4.1.1.2.1.2.1. Oolithes
[Planche_103]
Nous ne traiterons ici que des oolithes calcaires marines de façon relativement succincte. Pour plus d’informations sur ces dernières et sur celles d’origine différentes (continentale, lacustre, cavernicole, ferrugineuses etc.…) on doit se référer à des ouvrages spécialisés et notamment à Lucas et al. (1976).
Les oolithes sont des grains de carbonate de la taille des arénites, c'est-à-dire comprise entre 63 µm et 2 mm. Leur contour est sphérique. Elles sont constituées d’un nucléus de nature très variable (grain de quartz, bioclastes, agrégats, etc..) autour duquel se superposent des couches concentriques minces et relativement régulières pour constituer le cortex [Planche_104]. Signalons que le nucléus peut être absent, soit parce que la coupe ne le traverse pas, soit parce qu’il a disparu. Lorsque le cortex est réduit à quelques couches, on parle de proto-oolithes [Planche_111].
La structure interne et la morphologie des oolithes dépendent, en grande partie, de leur condition de genèse, on peut ainsi observer :
– des oolithes dites composées, dont le nucléus peut être composé de plusieurs oolithes par exemple ;
– de oolithes asymétriques ou excentriques sur les quelles la précipitation carbonatée à été irrégulière provoquant un accroissement du cortex excentré ;
– des oolithes déformées donnant des contours ovoïdes en raison d’une compaction précoce du sédiment, ou bien à la forme allongée du nucléus [Planche_105]. La compaction peut entraîner des phénomènes de pression dissolution proche de ce que nous avons décrit à propos des grès quartzites (voir composants des roches détritiques terrigènes).
Minéralogie et microstructure
A l’origine les couches concentriques sont en aragonite transformées précocement en calcite.
Les couches concentriques présentent deux types de structure cristalline qui alternent de façon plus ou moins régulière, constituant ce que certains auteurs appellent un « aspect en pelure d’oignon ». On distingue :
– Des couches à structure fibreuse de teinte jaunâtre à chamois, parfois ambrée*, translucide en LPNA. En LPA on observe une forte biréfringence (teintes de polarisation vives).
– Des couches à structure crypto cristallines (micrite).
Une même couche concentrique peut présenter les deux structures. On note souvent, avec le vieillissement des oolithes, une augmentation du nombre et de l’épaisseur des couches « micritisées »). Cette recristallisation est une transformation précoce, parfois « syngénétique » (contemporaine de la genèse de l’oolithe). Elle pourrait correspondre (sans certitude) à la transformation de l’aragonite en calcite).
Genèse des oolithes
L’observation au microscope électronique montre que les couches aragonitiques des oolithes actuelles sont constituées de minuscules aiguilles (nano aiguilles) en aragonite, tangentielles aux couches du cortex. On pense que les nano aiguilles sont présentent dans l’eau sous forme de suspension. Elles proviennent soit de la précipitation chimique, soit de l’altération d’organismes à squelette aragonitique (algues, Mollusques, oolithes etc..). Ces nano aiguilles sont agglomérées par collage sur un mucilage algaire qui enduit la surface des grains. Cependant, des études récentes au microscope électronique ont montrées que les nano aiguilles d’aragonite ont pu précipiter en position radiaire (disposition normale pour la précipitation de l’aragonite) puis évoluer en position tangentielle par tassement ou écrasement de la couche. Par ailleurs, on a observé, fixés à la surface de certains oolithes, des Algues ou des Foraminifères pouvant intervenir dans la genèse des couches aragonitiques.
Les couches micritiques (crypto cristallines) proviendraient de la précipitation directe de nano grains d’aragonite dans le mucilage qui entoure l’oolithe.
Transformations diagénétiques
Il est rare de retrouver les oolithes fossilisés dans la roche avec sa structure d’origine. La plupart du temps la transformation de l’aragonite en calcite entraîne des structures cristallines diagénétiques particulières. La plus marquante est la structure radiaire où la calcite cristallise en prismes à disposition rayonnante tout en conservant la structure concentrique [Planche_106].
Intérêt
Selon Arnaud Vanneau (in Preat et al., 2004), les conditions nécessaires pour que se forme des oolithes sont les suivantes :
– le milieu de formation doit correspondre à des zones de mélange entre des eaux océaniques relativement fraîches et sous saturées en carbonates dissous et des eaux de plate formes peu profondes, surchauffées et saturées en carbonates dissous : cette zone se situe sur la bordure externe, le long de la rupture de pente des plate formes tropicales ;
– il doit exister des courants de marée bidirectionnels qui maintiennent périodiquement les oolithes en suspension dans la tranche d’eau ;
– l’épaisseur de la tranche d’eau doit être faible (en général entre 2 et 10 mètres), pouvant aller jusqu'à l’émersion temporaire ;
– le milieu doit être agité à modérément agité.
Ce sont des conditions très strictes, que l’on ne trouve que sur les plates formes tropicales peu profondes. Exemple actuel : les Bahamas où se trouve de grandes accumulation d’oolithes sous forme de grands bancs ou de dunes hydrauliques. [Planche_103]
Les oolithes offrent les mêmes réponses aux contraintes hydrodynamiques du milieu que les grains de sable siliceux. Les caractéristiques structurales (structures sédimentaires) et texturales (paramètres granulométriques) seront du même type et auront les mêmes significations et donneront des indications sur la turbulence du milieu, la force et la direction des courants, les zones de transit et de sédimentation etc.… C’est ainsi que l’on rencontrera des faciès à oolithes très bien classées et dépourvues de matrice boueuse correspondant à des bancs ou à des plages lessivées par le déferlement de la houle ou par les courants et des faciès à oolithes mal classées dans une matrice boueuse correspondant à un environnement plus protégé.
Les oolithes, dans le passé, ont constitué de grandes accumulation de plages, de bancs, de cordons etc.. Les formations oolithiques peuvent être rapidement consolidées et constituer des barrières ou des haut fonds associés ou non à des récifs coralliens [exemple les faciès oolithiques du Bajocien d’Aquitaine, région de Nontron].
* Cette teinte jaune ambrée est due à la présence d’une matière organique proche du mucilage des Cyanophycées et qui joue un rôle important dans la précipitation des fibres d’aragonite, comme nous le verrons plus loin.
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